Abbaye aux Hommes

Vous voilà sur l’esplanade Jean Marie Louvel face à l’impressionnante abbaye aux hommes.
Caen abrite deux énormes abbayes, celle-ci, ainsi que son homonyme féminin, l’abbaye aux dames de l’autre côté de la ville.
Tout cela remonte à l’époque où Guillaume le Conquérant s’appelait encore Guillaume le Bâtard.
À 22 ans, il épouse Mathilde de Flandres contre l’avis du Pape ! Ce dernier est en effet opposé à leur union, car leur lien de parenté est trop rapproché. Alors que bon, avouons qu’en 1049, ça n’a jamais trop gêné personne de se marier entre cousins. Guillaume épouse donc Mathilde, parce que quand même, politiquement, ça les arrange bien vu que la belle Mathilde est accessoirement la nièce du roi de France Henri 1er.

Le pape suivant, malin, finit par accepter l’union en 1053, à condition que le couple s’engage à construire 4 hôpitaux et 2 monastères.
Ce sera chose faite, et près d’un millénaire plus tard, la ville de Caen peut encore se targuer d’avoir deux splendides abbayes à son actif, où les célèbres époux sont respectivement enterrés!

Celle que vous avez sous les yeux est l’un des plus beaux exemples d’architecture normande romane. Elle inspirera d’ailleurs la construction de beaucoup d’abbayes en Angleterre.
Cela prend tout son sens quand on sait que Guillaume, notre cher duc de Normandie, va devenir roi d’Angleterre en 1066 ! Sachez d’ailleurs, pour la petite histoire, que les descendants des Normands en Angleterre vont laisser sur leur nouvelle terre d’accueil, les traces d’une grande influence française. Ils vont notamment acheminée par bateau la pierre de Caen, et l’utiliser dans de nombreuses constructions emblématiques du pays, comme la tour de Londres, le château de Windsor, l’abbaye de Westminster, la cathédrale de Canterbury et bien plus encore !

Mais revenons au XIe siècle. Guillaume, suite à la conquête de l’Angleterre, finance assez facilement cet important chantier, qui sera rapidement terminé.
L’édification de ces deux abbayes, plus encore même que la construction du château va créer une unité nouvelle entre les différents noyaux d’habitation et fonder une véritable cité à Caen. La vie va se développer autour de ces centres religieux, créant les quartiers de “Bourg l’abbé” à l’ouest et de “Bourg l’Abesse” à l’est. Je vous laisse admirer l’ensemble, aujourd’hui divisé en plusieurs parties.

Face à vous, avec sa façade où flotte le drapeau français, se trouve l’hôtel de ville de Caen, installé dans les anciens bâtiments conventuels du XVIIIe siècle.
Derrière sa façade se cache un très beau cloître avec des galeries d’arcades encadrant un grand jardin à la française. Ce dernier servit de cours de récréation aux élèves, lorsque le bâtiment fut transformé en lycée en 1804.
À droite, vous voyez le chevet de l’église abbatiale Saint-Étienne. Elle domine l’abbaye et abrite le tombeau de Guillaume le Conquérant. Profanée par les protestants durant les guerres de religion, elle est rénovée avec soin au XVIIe siècle et à nouveau consacrée en 1626.
À la Révolution, elle sera transformée en temple dédié au culte de la raison et de l’être suprême, une sorte de culte philosophique civil lancé dans les années 1790. À l’entrée en vigueur du Concordat en 1801, qui pose de nouvelles règles entre l’État et les différentes religions en France, l’église est réouverte au culte, mais en tant que paroisse.
Vous la découvrirez si vous prenez une visite guidée de l’abbaye, mais elle peut également se visiter librement hors des offices religieux. L’entrée se fait de l’autre côté, sur la place Monseigneur des Hamaux.

D’ailleurs, si vous faites le tour des bâtiments, vous pourrez voir également le palais ducal, construit au XIVe siècle pour héberger les invités de marque de l’abbaye et situé aujourd’hui de l’autre côté de la rue. Classé monument historique, il abrite aujourd’hui un espace d’art contemporain.
L’ancienne salle des gardes, que vous verrez accolée à l’hôtel de ville sur la gauche, après avoir été un gymnase et un hôpital militaire, sert aujourd’hui de salle de délibération au conseil municipal.
L’ancienne boulangerie, le petit bâtiment du XVIIe siècle qui lui fait face, et est devenue aujourd’hui un musée d’initiation à la nature. Et le bâtiment de style classique que vous voyez sur votre gauche est le Petit lycée, construit au XIXe siècle et aujourd’hui occupé par la police nationale.

Les années passent, nos besoins évoluent, et l’Abbaye aux Hommes, fidèle à Caen, lui apporte toujours son soutien à travers les temps.