La Liberté inachevée

Si vous vous arrêtez un instant au centre de ce petit square, c’est pour observer une œuvre si sobre qu’on pourrait presque passer devant sans la remarquer. Pourtant, si vous avez noté le nom du square , Victor Schœlcher , vous avez déjà un indice sur le sens de cette stèle. Pour les autres, sachez que Schœlcher fut un homme politique français du XIXe siècle, à l’origine du décret de 1848 qui mit fin à l’esclavage dans les colonies françaises. L’œuvre que vous avez devant vous, La Liberté inachevée, sculptée par Gilles Roussi, rend hommage à cette mémoire. Regardez de plus près chacune de ses faces : vous y verrez des QR codes gravés, permettant d’accéder à des textes d’auteurs, tous centrés sur les thèmes de la liberté et de l’esclavage. Le Sud reprend un extrait puissant d’Aimé Césaire, grand poète et homme politique martiniquais. La face Est vous renvoie à un texte d’Albert Camus, écrivain et penseur de la révolte, dont l’œuvre interroge sans relâche la justice et la condition humaine. L’Ouest, elle, cite Pierre Choderlos de Laclos, connu pour Les Liaisons dangereuses, mais aussi pour ses prises de position progressistes à la veille de la Révolution française. La face Nord renvoie au portail de la ville sur lequel un nouveau texte peut-être à chaque fois renouvelé. Gilles Roussi, lui, en tant qu’arrière-petit-fils d’esclave et neveu d’Aimé Césaire, porte cette mémoire dans sa propre histoire. Sa sculpture, faite de marbre noir et d’ardoise brute, est volontairement inachevée. Parce que la liberté, n’est jamais complètement acquise. Elle reste à construire, à défendre, et à repenser sans cesse.