Eglise Saint-Pierre-de-Montmartre

Juste un mot sur cette petite église que vous avez devant vous, bien souvent éclipsée par la Basilique du Sacré-Cœur. Sa construction débuta en 1134, ce qui en fait la deuxième église la plus ancienne de Paris, derrière celle de Saint-Germain-des-Prés.

Il y avait là, avant elle, une basilique mérovingienne du Ve siècle, dédié à Saint-Denis, le premier évêque de Paris. Très délabrée au XIIe siècle, le roi Louis VI, dit Louis le Gros, la fait remplacer par une nouvelle église romane. En même temps, Adélaïde de Savoie, sa femme, fait ériger l’abbaye bénédictine Notre-Dame de Montmartre.

L’abbaye possédait des vignobles et l’abbesse avait droit de justice sur les habitants. L’église était donc à la fois abbatiale et paroissiale. En 1686, les religieuses déménagent dans un nouveau monastère, surnommé l’abbaye d’en bas, qui explique l’appellation de l’actuelle place des abbesses.

En 1794, retournement de l’histoire, l’abbesse est guillotinée, les religieuses renvoyées et les monastères sont vendus et rasés ! On ne garde que l’église, comme paroisse de village, et on installe le télégraphe optique de Chappe dans son clocher !

Transmettre des messages rapidement a toujours été crucial dans l’Histoire. Pendant la Révolution, alors que la France est entourée d’ennemis, Claude Chappe met au point un ingénieux système de codes, traduit par un bras articulé au sommet d’une tour. Une autre tour, munie d’une longue-vue, recevait ces codes, et les produisait à son tour, créant ainsi une chaîne jusqu’au destinataire final.

Un message, codé qui plus est, pouvait alors arriver en quelques minutes à destination, contre plusieurs jours par cavalier. Vous aviez donc ici, sur la place du Tertre, l’une des tours du réseau télégraphique de France.

Après l’interdiction du culte sous le régime de la terreur, elle est, à l’instar d’autres églises non détruites, transformée en temple de la Raison. Ces temples athées servaient au culte de la Raison puis de l’Être suprême, mis en place par Robespierre. Ce culte philosophique, se voulait la représentation des idéaux des Lumières, et proposait une religion civile apaisée au service de l’État, et en trouvant Dieu par la raison et non par la foi.

Sous l’invasion russe, l’église est réquisitionnée, puis à nouveau profanée pendant la Commune. Entre la construction de la basilique du Sacré-Cœur et de la nouvelle église Saint-Jean de Montmartre, notre vieille église Saint-Pierre a bien failli être démolie.

Il faudra attendre 1923 pour qu’elle soit classée monument historique et la fin des années 80 pour qu’elle soit profondément restaurée. Aujourd’hui, elle est l’une des cinq églises du XIIe siècle de Paris, et dans son cimetière reposent depuis toujours les meuniers, vignerons et paysans qui vivaient à l’époque dans le village de Montmartre.