La Maison des Deux Sirènes

Là, juste à l’angle du bâtiment, combien de fois vous passeriez devant ses deux statuettes, comme enlacées l’une à l’autre, sans même leur prêter attention. À plusieurs reprises, j’ose croire.
Pourtant, vous êtes loin d’imaginer un instant que ces personnages de pierre, davantage des tritons plutôt que des sirènes, si l’on s’en tient à la barbe qu’ils affichent, sont en réalité l’une des seules traces restantes de l’ancien “Hôtel des Deux Sirènes”, construit ici à la fin du XVIe siècle. La porte au numéro 5 de la rue Saint-Michel, ornée d’une tête d’Indien, en est un autre indice.

À Nancy, on raconte que cet ancien établissement hôtelier a servi de refuge à un honorable couple en cavale, le temps d’une nuit pleine de rebondissements. Les noms des concernés sont : le duc Nicolas-François et la duchesse Claude de Lorraine.

Pour vous redonner le contexte, nous sommes en 1634 et les Lorrains ne digèrent pas l’abdication du duc Charles IV, en faveur de son frère Nicolas-François, alors cardinal de Lorraine et évêque de Toul. Mais Nicolas-François n’en a que faire de l’avis des Français. Il renonce à ses fonctions ecclésiastiques et épouse sa cousine Claude, héritière directe de la couronne ducale.

Alors que les jeunes mariés sont retenus sous surveillance au palais, ils parviennent à s’enfuir et à se retirer à “l’Hôtel des Deux Sirènes” via divers stratagèmes. À tour de rôle, Nicolas-François et Claude vont se déguiser en valets pour passer le corps de garde en toute discrétion.
Une fois hors du palais, le couple va à nouveau se costumer pour ne pas se faire reconnaître dans les rues de la ville, qui en ce 1er avril, jour de marché, sont bien fréquentées.

C’est donc en habits de paysan que les deux amoureux en fuite parviennent à l’hôtel. Mais pour leur sécurité, ils y restent que peu de temps et préfèrent prendre la route pour Florence.
Ce n’est que bien plus tard dans la matinée que leur absence sera finalement remarquée. Quelle drôle d’histoire !