Tour Jeanne d’Arc

Un Gros Horloge scintillant, une cathédrale en dentelle de pierre, quelque 2000 maisons à colombage aux couleurs et aux styles variés, Rouen, c’est un ensemble patrimonial tellement hétéroclite et démonstratif, que l’on est sans cesse émerveiller. Mais rappelons que la valeur d’un trésor ne tient pas toujours à son esthétique. L’histoire qu’il raconte a elle aussi toute son importance. Prenons par exemple cette modeste tour en pierre à gauche, dont vous devez timidement apercevoir le sommet.

En 1204, alors qu’il vient de reprendre le duché de Normandie des mains de Jean sans Terre, roi d’Angleterre, Philippe Auguste, roi de France, exige la construction d’un puissant château à Rouen. Ce dernier, probablement l’un des plus grands que le monarque est fait faire, se dresse sur la colline Bouvreuil, pour mieux dominer la ville. On lui compte en tout 10 majestueuses tours défensives avec comme pièce maîtresse : un donjon d’environ 30 mètres de hauteur et 14 mètres de diamètre. Ce dernier, autrefois séparé du reste de la forteresse par un fossé, a traversé les aléas du temps pour se tenir encore devant vous aujourd’hui. Avouez que votre regard sur la modeste tour des premières secondes a déjà là, bien changé. Et ce n’est pas fini !

Lieu de défense, lieu administratif, mais aussi lieu de pouvoir, le château de Philippe Auguste a été le théâtre d’événements historiques capitaux. Durant la guerre de Cent Ans, conflit qui a opposé le royaume de France à celui de l’Angleterre à la fin du Moyen Âge, il est l’endroit où une certaine Jeanne d’Arc va voir sa vie basculer en l’espace de quelques mois. En tant que bref rappel, Jeanne d’Arc est cette jeune paysanne, pieuse et illettrée, qui à l’âge de treize ans va entendre des voix l’encourageant à délivrer la France de l’occupation anglaise. C’est à elle que nous devons une victoire exceptionnelle lors du siège d’Orléans vers 1428 et le sacre du roi Charles VII à Reims en 1429. Mais capturée à Compiègne par les Bourguignons du duc Philippe le Bon, avec qui Charles VII va se réconcilier à Arras en 1435, Jeanne d’Arc est vendue aux Anglais et faite prisonnière dans le château de Rouen. Du 23 décembre 1430 au 30 mai 1431, elle est captive dans la “tour de la Pucelle”, dont il ne reste plus que les fondations au niveau de l’actuel 102 rue Jeanne-d’Arc.

Le 9 mai 1431, la jeune femme est conduite dans ce donjon et menacée en vain de torture, pour signer des aveux. Son procès, acte d’injustice, la déclare hérétique et bonne à être brûlée vive sur le bûcher. Chose qu’elle sera le 30 mai 1431, place du Vieux-Marché. Classé monument historique en 1840, le donjon de Rouen, ou la tour Jeanne d’Arc, a fait l’objet d’une étonnante reconversion en 2017. En plus d’accueillir un musée, un escape game historique et culturel plonge les visiteurs dans un décor immersif en lien avec l’intrigue du jeu. Rouen, du temps de la Seconde Guerre mondiale, comme si vous y étiez.